La maison de Marck est assez grande pour une personne qui vit seule. Derrière la lourde porte en bois, nous passons par le garage qui abrite une sublime Corvette noire, comme peinte à la laque. La structure est bien basse et bien lisse. Ces engins là montent à plus 250 km/h et Carlos, le père, ne s'est pas gêné pour l'atteindre sur l'autoroute.
Nous sommes un peu désoeuvrés, jusqu'à ce que Marck ait l'idée de m'emmener jouer du piano dans un "mini-conservatoire". On y rencontre un professeur, Jonatan, à l'accent assez espagnol, ou plutôt catalan. Je commence par jouer "The Heart Asks Pleasure First" de Michael Nyman, un air connu du film "La leçon de piano" de Jane Campion. Je pianote le début de Cancer de My Chemical Romance, et un des élèves de Jonatan se retourne avec l'air surpris. Je comprends quand je lis "My Chemical Romance" imprimé sur son T-shirt. Un fan,autre fan! Ensuite, Marck m'emmène à un café où joue Lalo, un de ses anciens prof de guitare. Nous sirotons un "Cookies and Cream", cappuccino agrémenté de miettes d'oreos et de lait condensé. Marck demande à Lalo qu'il joue sa chanson préférée. Tout ce que j'en ai retenu c'est "La vida es una cancion, aquél que no se la sabe la tararea." La vie est une chanson. Celui qui ne la saît pas la choubidoubidouwah (en gros murmure des sons imprécis au lieu des paroles.
Nous arrivons au Zocalo. Des musiciens se préparent sur la place; puis arrive le même Lalo avec sa guitare pour jouer la MEME chanson, accompagné d'un flutiste, devant un gros public. Nous dansons comme des idiots avec Marck. Une fois que nous nous sommes lassés, nous allons embêter des petits mexicains en train de jouer au foot. Je retiens ma respiration chaque fois que le ballon passe à deux doigts des étalages de bonbons autour de l'aire de jeux. Après qu'un policier ait rouspété, nous sommes contraints d'arrêter. Que faire à présent? Rentrer à la maison.
Plus tard dans la soirée, Marck appelle Alejandro, un ami, qui nous propose une sortie en boîte. Après avoir traversé toute la ville à trois sur un scooter, nous arrivons au niveau d'un faux palmier décoré de néons flashys. Pendant le trajet, j’avais la vague impression d’être de retour au Vietnam. D'autres amis de Marck le saluent dont Noemi, une des organisatrices de la soirée. Elle est plutôt jolie, vêtue d’une robe de soirée noire en bustier, d’un collier en faux diamants et d’une banderolle à la Miss France. Tiens ç’aura été une de mes rares soirées en « boîte » et il a fallu que je vienne jusqu’à Tulancingo pour sortir.
Il est minuit et Marck me déclare : « ya me aburrí ». Le verdict étant tombé, nous rentrons donc à pied à la maison. Carlos rentre aussi à une heure assez tardive car il travaille énormément (je dirais même sans relâche, puisqu’il suffit que quelqu’un l’appelle à trois heures du matin pour qu’il accourre). Il a laissé sur la table un énorme cheesecake à la framboise, pour l’anniversaire (un peu tardif) de son fils. Je regarde sans comprendre un journal d’informations présenté par un clown surréaliste, le meilleur noticiero selon Marck. C’est peut être une version à la mexicaine des Guignols de l’Info. Un peu après, je file dormir dans la chambre de César, le défunt frère de Marck, où les placards sont remplis de figurines de Star Wars poussiéreuses. Il était apparemment un grand collectioneur.
Le lendemain, je suis surprise de voir une femme entrer dans la chambre. C’est en fait la dame de service qui aide la famille depuis 10 ans, et qui s’est un peu relâchée dans son travail, me dit Marck. Pour lui, la vaisselle de chez nous est bien plus propre que celle d’ici. Nous allons chercher le papa au cabinet pour aller manger. A l'intérieur de l'ambulance paternelle (équipée d'un écran DVD!) nous fonçons dans les virages. "El Doctor Villegas" me parle en même temps qu'il manie le volant, mais je n'écoute pas. Je suis terrorisée par la vitesse avec laquelle il prends les virages montagneux. Tel père, tel fils dit-on. Je savais que les ambulances filaient à toute allure, mais celle là bat tout les records alors qu'il n'y a aucune urgence, juste celle de déjeuner.
Nous arrivons à une sorte de chalet, construit de rondins de bois si je me souviens bien. Nous commandons une entrée bien généreuse: tortillas, avocat, chorizo, couenne de porc. Je craque pour le chorizo. Vient ensuite une soupe de champignons pour moi, une soupe de lentilles pour le Docteur et une paella (!!) pour Marck. Lorsqu'arrive ma "trucha a la veracruzana", une sorte de plat à base de poisson entomaté, je n'ai déjà plus faim. Va pour un dessert? Noooon!
Par contre, je suis persuadée que les animaux du zoo où Marck m'a emmenée étaient mort de faim. Après un retour en voiture au centre de Tulancingo et trois montées terrifiantes, j'arrive hors d'haleine au zoo. Nous sommes venus nourrir les singes, les lamas, les autruches, les canards,les "martuchas" des animaux ressemblant à des loutres, aux yeux étrangement blancs.
Je tends une brindille d'herbe à un petit singe, qui a l'air tout à fait inoffensif. Erreur: il pousse un hurlement strident en m'aggripant toute la main. Je recule en criant aussi. S'il y en a un qui rigole bien, c'est Marck. Je remarque une chose: les animaux sont restés bien machos. Ce sont les mâles qui viennent rafler toute la nourriture que nous donnons, alors que les femelles restent en retrait, l'air triste et surtout soumis. Je m'offre des sensations fortes en effleurant les ailes et le cou d'une autruche, ainsi que la queue d'un crocodile. Cela m'a fait bizarre de tendre la main à des singes qui n'avaient pas l'air si animaux que ça. Sur leur main, des empruntes digitales comme les nôtres, de grands yeux humides, une moue boudeuse, et beaucoup, beaucoup de poils. Les responsables du zoo viennent nous chercher pour nous dire de partir, car ils ferment. Nous repartons satisfaits.
Nos pas nous mènent vers le Zocalo, où nous allons déguster des glaces Santa Clara. Elles sont très bonnes, mais il faut y mettre le prix. Je choisis Crème écossaise et mangue light, et mi compañero prend citron et manque light. Nous tombons dans le comble de l'impolitesse en assistant à un mariage à l'intérieur de la Cathédrale de Tulancingo, en train de lécher nos glaces. Marck trouve l'édifice affreusement laid. Je décide qu'il vaut mieux partir avant de se faire attraper!
La cathédrale de Tulancingo
Un dernier au revoir au Docteur, un salut à la tante de Marck et à son fils roux comme Poil de carotte, et nous prenons la route vers le Distrito Federal. La nuit est déjà tombée.
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