jeudi 6 août 2009

Le secret des moles mexicains

Paris, le 26 novembre 2008


Est-ce la cuisine mexicaine ne vous évoque qu’un plat de chili con carne et du guacamole ? Est-ce que pour vous le chocolat n’est bon que dans les desserts ? Si oui, personne ne peut vous en vouloir. Mais pensez urgemment à organiser un tour gastronomique du Mexique (si, rien que ça !) pour vous faire une idée de cette merveilleuse culture. A défaut, ces quelques mots de poésie culinaire vous mettront l’eau à la bouche.


Il ne faut pas se fier à l’apparence banale de la cantine populaire « El Don ». Située à quelques pas de l’université du Tec de Monterrey, dans la capitale, on la connaît mieux sous le nom de «La Puerta Negra ». Passée la lourde porte noire, qui est à l’origine du nom du lieu, on tombe sur les tables couvertes de nappes de papier blanc. Les étudiants, penchés sur leurs assiettes généreusement remplies, mangent et discutent bruyamment. Plat du jour : « Mole con pollo », ou poulet en sauce « mole ».


Et dans votre assiette, c’est le miracle qui se produit : une tendre cuisse de poulet cuite dans son jus, recouverte d’une épaisse sauce brune, au parfum mystérieux. Le plat a beau être national ; il existe en réalité mille et une manières de préparer le «mole». L’histoire du met remonte à l’époque précolombienne. En ce temps, les Aztèques préparaient pour les grands seigneurs un plat appelé « Mulli ». En nahuatl [la langue aztèque], cela signifie mélange ou potage. La légende veut que la recette originale contienne près de cent ingrédients, après qu’un cuistot maladroit ait malencontreusement renversé un chariot couvert d’épices et de chocolat sur des marmites, où cuisaient des dindons.


Les Mexicains adorent manger épicé. C’est donc avec une joie gourmande que les poblanos [habitants de Puebla, à 110 km au sud-est de México] glissent diverses variétés de piments dans leur recette : des piments «anchos », des « mulatos », des « pasillas » et des « chipotle ». Ce sont les « pasillas » qui donnent sa couleur marron à la sauce. Mais le vrai secret, c’est le chocolat, que l’on agrémente d’amandes, de noix, de raisins secs, de graines de sésame, de cannelle, de persil, de poivre, d’oignons et d’ail. Les graines de sésame sont la touche finale, que l’on saupoudre légèrement au-dessus du poulet encore fumant. Il est servi avec son riz à la tomate et ses tortillas de maïs. Comment le déguster ? Sur la place principale de Puebla, lieu aussi animé que coloré.


Le vrai mole de Oaxaca [ville du sud du Mexique], lui, est aussi noir que du pétrole. C’est pour cela qu’on l’appelle le « mole negro » [le mole noir]. Il tient sa couleur surprenante de ses principaux ingrédients : les piments « chilhuacle» noirs, « chilhuacle » rouges et « mulatos » noirs. Dans cette délicieuse version, on retrouve à la différence du premier du chocolat typique de Oaxaca (qui se caractérise par son goût sucré et son arôme à la cannelle), des feuilles d’avocat grillées, des pépins de citrouille, de l’anis, du thym et de la marjolaine, du cumin et un bâton de cannelle.


Pour vivre une expérience sans égal pour vos papilles, il ne faut pas manquer le restaurant « Como agua pa chocolate », inspiré du roman du même nom. Il est très agréable de dîner en terrasse les soirs d’étés, car le restaurant est situé place Alameda, avec une très belle vue sur la cathédrale. Des citations tout droit sorties du livre se baladent allègrement sur les murs jaunes, dans une ambiance cosy et romantique. On y sert un plat appelé « Champandongo » dont la douceur surprend le palais : un gratin de viande hachée, avec des noix, des amandes et du citron confit, couverts de mole noir. Pour les curieux qui voudront goûter à tout, il faut bien sûr demander la farandole des cinq moles de Oaxaca, (negro [noir], coloradito [rouge], amarillo [jaune], verde [vert] ou estofado [à l’étouffée]. Ainsi, la célèbre sauce mexicaine n’aura plus de secret pour vous.


Où se procurer les ingrédients à Paris et alentours?
- Mex & Co : 10 rue du Dante, 75005 Paris
- L’épicerie de Bruno : 30 Rue Tiquetonne, 75002 Paris
- Dos Mexicanas : 33 avenue Georges Clémenceau, 93420 Villepinte
- La boutique de Mexique-fr.com

Source : http://media-cdn.tripadvisor.com/media/photo-s/00/1b/47/50/mole-poblano.jpg

Le chihuacle negro, ingrédient du mole noir


Le mole noir

vendredi 31 juillet 2009

México, un an après

Houla, que le temps passe vite. Le 2 juin 2008, je prenais l'avion pour Paris, l'oeil sec. La tristesse est comme une bombe à retardement dans ces cas là: on sait qu'on est censé être triste, mais les larmes ne viennent pas. Reste juste un sentiment de vide. Adieu mes amis mexicains, adieu les tacos.

Comme j'ai une mémoire plutôt photographique, ce sont des images qui restent dans mon esprit. Je me revois dans le taxi, en train de regarder d'un oeil morne les petites baraques de la mégalopole. Au volant, le père de Rosario, l'amie qui m'a offert mon premier hébergement au Mexique.Je me revois au sommet d'une pyramide à Teotihuacan, en train d'observer les autres touristes grimper vers moi. Puis il y a cette chambre aux murs blancs à Cancun, d'où on peut observer la mer des Caraïbes, ou encore les couleurs violentes imprimées dans la foule mexicaine.

Je me souviens donc parfaitement du jour de mon arrivée à México, parfaitement de celui de mon départ définitif pour Paris. Ce qui s'est passé entre me fait parfois défaut, puisque la routine a eu le temps de s'installer en huit mois. Une chose est sûre, j'adore la culture latino et j'aimerais la faire partager. Il règne une ambiance de fête en général, malgré les problèmes de délinquence et de corruption. Quand le policier s'approche, on a envie de prendre ses jambes à son cou de peur qu'il nous réclame un billet de 100 pesos.

J'ai eu la chance de faire ce que j'aimais là-bas. Pourquoi ne pas continuer en France? A mon retour, j'ai fait un stage d'un mois et demi à Courrier International, section Amérique latine. Je n'ai pas chômé: libération d'Ingrid Betancourt, et puis surtout préparation du dossier sur les narcos au Mexique. J'ai du éplucher la presse nationale: El Universal, Milenio, Proceso...Maintenant les chefs de cartels de drogue n'ont plus de secret pour moi. Le numéro n°922 est sorti et est titré l'Overdose.

Malgré cela, j'aime ce pays. Avec ses qualités et ses défauts. J'ai aussi attrapé l'accent mexicain, sans oublier les expressions un peu rudes du langage. Toutes les insultes tournent autour du verbe "chingar" (violer). Me reste encore à lire le roman d'Octavio Paz appelé "Le Labyrinthe de la Solitude". A ce qui parait, il contient la quintessence de la manière de penser mexicaine.

J'ai bien envie de retourner au pays, mais qui y retrouverai-je?